Sereni va boiser une parcelle forestière à Florenville, dans la province de Luxembourg. Une symbiose entre une manière de faire ses adieux et la plantation d’arbres.
Connaissances, Deuil, Lieu, Nature, Spécial
C’est par une journée d’été quelque peu nuageuse que Bram Coussement et Sarah Parent se sont rencontrés au S.M.A.K. de Gand. Quiconque aurait perdu la notion du temps aurait pu croire que c’était déjà l’automne. L’idée d’une petite balade dans le parc de la Citadelle, de l’autre côté de la route, s’est dès lors vite imposée. Le sol couvert de feuilles mortes donnait au parc un décor automnal. Un cadre idéal pour discuter des arbres, des adieux et de l’entrepreneuriat.
Texte © Laura Lemahieu – Photo © Filip Naudts
En fait, je vois l’adieu comme un livre que l’on donne plutôt que comme un livre que l’on ferme.
Bram Coussement, CEO de Sereni
S’il y a une chose que Bram Coussement et Sarah Parent ont indubitablement en commun, c’est leur passion viscérale pour l’entrepreneuriat. Bram Coussement est le CEO de Sereni, qu’il décrit lui-même comme « une entreprise de soins de A à Z ». Sereni n’est pas une organisation qui se contente de réunir les entrepreneurs de pompes funèbres.
C’est une plateforme qui rassemble tout ce qui a trait aux adieux. Le magazine le Souffle Nouveau est un exemple. Sarah Parent est CEO – Chief Ecological Officer, comme elle le dit elle-même de Go Forest, une branche de CO2logic consacrée à la reforestation. « Nous plantons des arbres dans des pays où les besoins de reboisement sont importants. En réalité, tous les pays doivent être reboisés, mais nous essayons toujours d’avoir un impact plus fort à l’étranger en créant aussi de l’emploi. Ce que nous voulons faire, c’est encourager les entreprises à intégrer la plantation d’arbres dans leur modèle économique », explique Sarah.
Avec Go Forest, Sarah Parent entend non seulement lutter contre la déforestation afin de réparer la nature, mais aussi sensibiliser à la problématique climatique actuelle. Une chose qui semble revêtir une importance cruciale à l’heure d’aujourd’hui. « Je remarque que 10 % de la population nient encore le changement climatique. C’est vraiment beaucoup. Et même chez les 90 % restants, il y a encore énormément de choses qui peuvent être améliorées au niveau des comportements. C’est ce que nous essayons de faire chez Go Forest. Je ne suis moi-même pas la parfaite écolo, mais je pense qu’il est possible de rendre quelque chose à la nature, sans pour autant devoir sacrifier ses désirs ou son style de vie. Je veux simplement que tout le monde ait accès à cela. Je ne suis pas une militante extrémiste. Attention, leur combat est vraiment indispensable. C’est vraiment génial qu’ils soient là parce qu’ils arrivent à mettre la pression sur le monde politique, mais moi je suis plus de ceux qui se mélangent aux entrepreneurs, se penchent sur leur modèle économique et envisagent des moyens d’intégrer la plantation d’arbres dans celui-ci. »
Planter des arbres et dire adieu
Au jour d’aujourd’hui, plus de cent entreprises ont déjà planté des arbres par le biais de Go Forest, et Sereni se joindra bientôt à elles. Pourquoi Sereni a-t il choisi d’entrer dans l’aventure de Go Forest ?
Bram Coussement: « Je crois fermement à la puissance du collectif. On dit souvent que changer la position d’un petit caillou dans une rivière peut suffire à en modifier le courant, mais je pense personnellement que l’on doit justement voir plus grand. On ne doit pas attendre que les écoliers aillent chaque année à nouveau planter un arbuste le long de l’autoroute. L’intention est excellente, mais il faut oser penser plus grand. Récemment, la une du Nieuwsblad titrait que le gouvernement flamand était en retard dans la mise en œuvre de son Plan Bois. On ne parvient donc pas à planter suffisamment d’arbres en Flandre pour le moment. Si les gouvernements s’associaient à diverses entreprises et PME de Belgique – qui ont par ailleurs une durée de vie plus longue que la leur – dans le but d’accomplir quelque chose dans le domaine du climat et de la nature, on pourrait enfin commencer à progresser, d’après moi. »
Bram Coussement: « Je crois fermement à la puissance du collectif. On dit souvent que changer la position d’un petit caillou dans une rivière peut suffire à en modifier le courant, mais je pense personnellement que l’on doit justement voir plus grand. On ne doit pas attendre que les écoliers aillent chaque année à nouveau planter un arbuste le long de l’autoroute. L’intention est excellente, mais il faut oser penser plus grand. Récemment, la une du Nieuwsblad titrait que le gouvernement flamand était en retard dans la mise en œuvre de son Plan Bois. On ne parvient donc pas à planter suffisamment d’arbres en
Sarah Parent: « Sereni est l’une des entreprises avec lesquelles nous collaborons qui y croit dur comme fer. On constate qu’il y a des différences de maturité entre les entreprises et que les raisons qui les poussent à planter des arbres sont aussi diverses. Mais chez Bram on sent tout de suite son enthousiasme. Pour lui, c’est une évidence que de rendre quelque chose à la nature. Il y a encore des personnes à qui je dois véritablement expliquer que nous, hommes et femmes, nous prenons beaucoup à la nature et qu’il est donc important de lui rendre quelque chose en retour. Mais même dans les entreprises qui n’ont pas encore atteint un degré de maturité suffisant, on remarque une volonté de faire plus, en écho aux réactions positives de leur entourage. Les entreprises ne partent pas toutes du même point de départ, et c’est précisément cela qui est passionnant. J’ai parfois l’impression d’être une missionnaire. »
Bram Coussement: « Entreprendre, c’est tout simplement faire quelque chose. Et cela vaut aussi pour notre collaboration avec Go Forest. Je peux passer mon temps à me plaindre qu’il n’y a pas assez de nature, trop de CO2, pas assez de forêts et que l’on coupe trop d’arbres mais, en fin de compte, ce qui importe vraiment, c’est d’agir. C’est mieux que d’en parler sans rien faire du tout. »
Sarah Parent: « En effet, les paroles sont aujourd’hui encore plus nombreuses que les actes. ‘Practice what you preach’, on n’en est bien souvent pas encore là. »
Chez nous aussi, il y a encore beaucoup à faire pour améliorer la santé de nos arbres. Les arbres sont malades en Belgique, c’est pour cela qu’il est également important de continuer à en planter aussi chez nous. Un message que Sereni a pris à cœur. L’an prochain, Sereni va boiser une parcelle forestière à Florenville, dans la province de Luxembourg, en collaboration avec Go Forest. L’histoire d’une symbiose entre une manière de faire ses adieux et la plantation d’arbres.
Bram Coussement: « Pour moi, faire ses adieux, c’est un peu comme transmettre un livre, plutôt que de le refermer. Vous pouvez ouvrir ce livre, le lire, emporter ce qui vous semble important et le transmettre à nouveau. L’adieu est aujourd’hui trop souvent perçu comme la perte d’un être cher, un éloignement. Je pense que nous devrions plus explicitement réfléchir aux questions telles que ‘qu’est-ce qui a été important dans ma vie’ et ‘qu’est-ce que j’aimerais que les autres en retiennent pour leur propre vie’. L’arbre en est une preuve vivante, car il continue d’exister à travers les générations. L’arbre raconte son histoire d’une manière ou d’une autre. Je pense que nous devrions vivre avec plus de conscience des choses. Que ce soit des relations humaines, de ce que vous aimez faire, de vos plats préférés, de vos hobbys favoris, mais aussi de ce que vous n’appréciez pas. L’essentiel, c’est de transmettre tout cela, bien entendu toujours dans le respect d’autrui, en respectant la culture de la personne. »
Sarah Parent: « Ce serait une belle idée que de tracer un circuit, par exemple, dans ce bois de Florenville, pour les personnes qui ont quelque chose de lourd à accepter ou simplement pour ceux qui éprouvent le besoin de se ressourcer. C’est vraiment très efficace. Se retrouver dans la nature, sans musique dans les oreilles, juste en écoutant les bruits qui nous entourent. Percevoir les changements de la nature est simplement beau. Je pense que chaque saison a sa beauté. Même si l’hiver est rude, je trouve qu’il regorge malgré tout de beautés. »
Se retrouver dans la nature, sans musique dans les oreilles, juste en écoutant les bruits qui nous entourent. Percevoir les changements de la nature est simplement beau.
Sarah Parent, CEO Go Forest.
Des obsèques plus vertes
Le secteur funéraire s’interroge sur la manière dont les funérailles peuvent être plus respectueuses de l’environnement. De plus en plus de personnes réfléchissent à la durabilité et à d’autres formes d’enterrement. Bram Coussement, le PDG de Sereni, a une opinion claire.
« En fait, je voudrais repousser le nombre de crémations. N’est-il pas étrange que nous gaspillions des quantités folles d’énergie et que nous créions des émissions nocives pour la planète en procédant à des crémations ? La question est la suivante : les gens sont-ils prêts à revenir à l’authentique ? En Allemagne, vous avez des forêts qui sont la dernière destination. Pas des paysages mornes, mais des arbres vivants qui composent une forêt. Un lieu à valeur sentimentale, où les familles avec enfants peuvent se promener et où les gens peuvent apprendre à connaître les différents arbres. Cela n’existe pas en Belgique. Ne serait-il pas préférable d’avoir une forêt où l’on peut à la fois enterrer et disperser les cendres ? »
Triste et stérile
« Nombre de cimetières sont tristes et stériles, par contre, d’autres sont très bien entretenus comme ceux de la guerre du Commonwealth. Les gens y sont juste enterrés, il n’y a pas de crémation, pas d’émissions, pas de combustion, il n’y a pas d’énergie utilisée. », conclut Bram Coussement.